dimanche 3 novembre 2013

Ctrl *







"vous voyez bien, c'est vide maintenant"

dit-elle.


Tout a été donné et puis tout repris.

Ctrl suppr.





lundi 2 septembre 2013

La Capitale

Paris.
Ses petites joies, ses petits ennuis.
Son asthme.
Sa climatisation.

Je suis rentrée depuis deux semaines déjà qui paraissent plusieurs siècles.

Tigre m'a rejoint cet été dans mes collines. Il a rencontré mes parents, il a vu mes endroits préférés, nous nous sommes réveillés ensemble chaque matin, nous nous sommes officialisés face à la terre entière et nous avons parlé de mille projets.


Et puis Paris.
Ses contrariétés, ses retours en arrière.

Les seuls projets que nous avons désormais sont de voler deux heures au monde par semaine et de ne pas s'en vouloir.


Paris.
Sa fatigue.
Ses moulins à vents.

Mon corps attaqué de toute part par des bactéries lutte comme il peut mais finit surtout par s'endormir partout.
Il cherche le calme.
Il cherche la peau.
Il cherche des promesses qu'on tiendrait, pour une fois.

Paris.
Ses antibiotiques.


mardi 9 juillet 2013

L'acteur américain



- Tu veux un enfant ?
- Non, il fait beaucoup trop chaud !



(ça lui apprendra à poser des questions idiotes)




A cette soirée de retrouvailles avec Tigre (j’ai l’impression qu’on ne vit que de ça : nos retrouvailles), il me présente de nouveau à son plus cher ami comme la fille qu’il aime et ça me touche profond, juste là, mais je ne dis rien, je souris, j’essaie d’être mignonne avec son plus cher ami.



Ensuite nous partageons des cigarettes avec ce très bel acteur américain, presque nus sous la chaleur de juillet.

Nous discutons et rions en deux langues rue Montorgueil, comme si nous étions de la même famille.

Un peu plus tard en cherchant un taxi je dis à Tigre "Personne ne voudra nous croire".




A propos du mail fleuve que je lui ai envoyé après la mort des mésanges, il me dit "il est vraiment magnifique, tu devrais le mettre dans ton prochain roman".
Je lui dis qu’il n’en est pas question. C’est un mail juste pour lui. Je lui rappelle qu'il ne m'a pas répondu.
Il me dit "toutes ces phrases juste pour dire au final "tu me manques"… Je n'allais pas répondre : bah oui moi aussi".


Tiger Tiger
Burning bright...




Tandis qu’au Cube l’ambiance s’effrite comme un très vieux granola, je repense aux yeux de l’acteur américain qui parcouraient ma robe, à son beau sourire qu'on ne voit d'habitude qu'au cinéma, et je me dis : J’aurais dû prendre des photos.



mardi 2 juillet 2013

Quatre mésanges dans un sac Claudie Pierlot


Ce week-end dans la maison de Swan en Normandie. Un petit havre de paix.
Ji trouve des mini mésanges tombées du nid. On les nourrit. On pense qu'elles ne passeront pas la nuit. Elles passent la nuit. Elles passent le week-end. Et voilà que je les ramène avec moi à Paris.

Quatre petits orphelins piaillant bec grand ouvert comme dans cette vieille pub pour Esso.

Yoyo face à ce boucan reste dubitative.
Ce chat gâté au Purina One a heureusement un instinct de bulot.


Ils habitent dans un pot de fleur au fond d'un sac Claudie Pierlot.

Dès que quelque chose grince dans la rue, j'ai l'impression qu'ils m'appellent.

Je les nourris d'amour et d'insectes séchés.

J'ai peur qu'ils meurent.
Pourvu que l'amour et l'eau fraîche, ça suffise aussi chez les oiseaux.











mardi 25 juin 2013

Tout bleu




- Tu m'aimes?
- Je préfère les livres.



(ça m'apprendra à poser des questions idiotes)



Quelques jours à bronzer dans le sud avec ma Sœur de cœur, mon Emma, mon oxygène.
J'ai rencontré son petit Noah tout neuf. Merveille.

Tout était bleu.


La rentrée à Paris est orageuse et compliquée, envahie de questions existentielles, et je passe plusieurs jours à jouer dans le noir avec le chat qui triche.
Et puis Tigre qui est plus ou moins là, mais quand il est là tout est bleu. Mon grand homme bleu.
Et puis ses yeux difficiles à décrire.

Ce qui m'inquiète c'est la couleur du monde quand il n'est pas là.
C'est l'attachement.
C'est tout ce qui ne brille pas.

Parfois tout est simple.
Et parfois le vernis s'écaille.
Et parfois même, c'est le ciel.




mardi 4 juin 2013

S'en remettre

Ces derniers jours, la moindre lumière perçant les nuages était accueillie comme le messie. J'en ai vu ouvrir la bouche pour recevoir le soleil plus profond (j'avoue, c'était moi).
La plupart du temps, quand même, on mettait des collants et on ne faisait pas la maline.

Mais juin est enfin là et ramène avec lui cette sensation oubliée, brûlure divine.

Bientôt les jambes nues tous les matins, on peut rêver un peu.


Avec Tigre, nous avons gentiment fêté notre anniversaire dans le sud-ouest, puis nous nous sommes violemment disputés à Paris.
On s'en remet.

On ne peut plus se passer l'un de l'autre de toute façon.

Un an ce n'est pas rien du tout.
Mais je ne sais pas quoi en penser.


Avec mes amis ce week-end au milieu des pâquerettes, une pause jaune et blanche et bleue et verte.
Et puis les jours qui de nouveau filent, le manque de sommeil. On s'en remet.
Le pollen, la gorge. On s'en remet.
Le Cube, les gens idiots, les méchants, les lourds, les bruyants. Aussi.

La cicatrice de Lou qui revient dès qu'on bronze.
Oui, oui, ça aussi.

Prendre des vitamines et regarder dehors; les corps flottants qui dansent sur fond bleu, je vais finir par leur donner des prénoms.

Je m'aperçois que les arbres ont des feuilles parce que je ne vois plus le pont.

C'est toujours comme ça.




mardi 14 mai 2013

Le printemps c'est joli pour se parler d'amour

En Bretagne, ma jolie grand-mère vit désormais dans un présent constant mêlé d'un passé éternel. Sa mémoire de quatre-vingt dix ans fait du yoyo. Elle me reconnaît quand même pour dire ensuite à mon grand-père "elle était courte sa robe" et puis elle se replonge très attentivement dans les emissions de l'après-midi.
Elle m'avait appris à jouer aux cartes et à rire de tout, elle est maintenant cette toute petite femme noyée dans un téléviseur.
Elle dit de temps en temps, à personne, pour elle-même : "je suis née en 1923" "on va se mettre à table" "faites attention sur la route".
Son anniversaire dont elle n'a pas vraiment conscience est l'occasion de se revoir tous ou presque. Ce côté de la famille qui a les yeux bleus.
On rit beaucoup. On mange beaucoup. On boit beaucoup de vin. On foule la plage de mon enfance et on monte en haut du blockhaus. On pointe du doigt le moulin dont je parle dans une de mes nouvelles. On vit dans un souvenir de grains de sable dans le goûter.

Tandis que de retour à Paris, le ciel gris gouverne un royaume de dépressifs.

Une grosse croix sur le printemps, voilà ce qu'on fait.


J'aime Tigre de tout mon corps et j'ai la trouille qu'il me plante d'un seul coup. J'ai la trouille qu'il se rende compte qu'il n'a rien à faire avec moi. J'ai la trouille qu'il en préfère une autre, une à la hauteur.
Ce sont des peurs incontrôlables et idiotes. On en a fait mille chansons qui ne nous apprennent rien.

Dans un message qu'il me laisse, sa voix grave m'assure "tu me manques beaucoup évidemment, ce n'est pas la peine de le dire".

Moi je trouve que c'est la peine, quand même.


Cette nuit je fais un cauchemar gigantesque en plusieurs parties. Je suis un serial killer qui dépèce ses victimes avec des ciseaux. Et puis je suis un inspecteur à sa recherche. Et puis je péris dans l'incendie d'un ascenceur transparent, en essayant de sauver des plantes en pot.

Je ne préfère pas chercher de signification à tout ça.



Adresse au printemps : dis, quand reviendras-tu ?




mardi 7 mai 2013

Vacances des animaux

Cinq jours qui ont semblé durer un mois, toujours à quelques mètres, maximum, des bras de Tigre. Nous avons vite pris l'habitude de nous endormir et de nous réveiller l'un contre l'autre. De laisser nos mains jouer ensemble dans la rue. De mordre nos nuques au soleil.
Nous n'avons pas su garder le secret quand il aurait fallu.
C'est pas ma faute, c'est ma bouche, c'est sa langue, c'est la peau.

Et puis rentrer à Paris, se dire salut, la violence de nos corps séparés jusqu'à quand on ne sait pas.
Horrible le manque les ongles qui brassent du vent et le lit qui ne sert plus à rien.

On s'occupe comme on peut, la vraie vie reprend ses droits, ses devoirs surtout.
Tigre et panthère chacun dans son coin.
C'est la fin des vacances des animaux.
Mais on s'en sortira comme toujours.
Tant que j'ai son parfum un peu partout sur le cœur.


jeudi 25 avril 2013

Le saviez-vous ?

Le briquet a été inventé plusieurs siècles avant l'allumette.
Le parachute a été inventé cent ans avant l'avion.
La conserve a été inventée soixante ans avant l'ouvre-boîte.


Odeur du soleil brûlant sur ma peau, sur les arbres, sur la terre et sur les Hommes.
Je sais que ça ne durera qu'aujourd'hui. On a tous regardé la météo.
Bloquée au Cube je trépigne les yeux noyés dans le ciel.
Un avion trace sa route vers le nord-ouest.
Les corps flottants se la donnent sur fond bleu.
Le vert nouveau des feuilles, cette couleur parfaite.


Hier soir, après cinq ans sans aucune nouvelle d'elle, j'aperçois Lou rue Racine.
Je panique et m'enfuis. Swan et Ji avec qui je suis m'aident à me calmer. Je ne sais pas pourquoi j'ai eu si peur, et pourquoi ensuite toute la soirée je ne pense qu'à elle.
"Jamais de ma vie je ne me remettrai de Lou", c'est quelque chose que j'avais écrit il y a longtemps.
Je ne le pense plus, maintenant. Je n'ai plus envie d'être hantée par elle, maintenant. Je n'ai plus le droit avec Tigre dans ma vie, maintenant.

J'aimerais être de nouveau hier rue Racine, m'approcher d'elle et lui faire la bise et rire de ce son clair des retrouvailles inattendues. Echanger des banalités. Lui présenter Swan et Ji, lui dire que tout va bien. Que je mets des robes, maintenant. Que j'aime un homme, maintenant. Que je me suis très bien remise d'elle.

Mais j'ai l'impression qu'on se remet plutôt mal de son premier amour.
Le saviez-vous ?




lundi 22 avril 2013

Lundi

Parfois le lundi matin est un peu lourd, on n'a pas le coeur masochiste à s'imposer des talons.
On met de petites chaussures plates et légères qui donnent l'impression d'être un chat. On sautille en marchant. On suit la ligne blanche de la piste cyclable en écartant un peu les bras pour garder l'équilibre (on ne sait pas ce qui nous attend si on marche à côté).
Les gens nous regardent. On se dit qu'on s'en fout.
J'aurai sept ans pendant longtemps.

Il ne fait pas si chaud. Dès qu'on est à l'ombre le corps se crispe.
Maudits soient ces immeubles construits entre le soleil et moi.

Maryv sur un trapèze samedi soir, ça m'a fait briller les yeux. La peur qu'elle tombe. La joie qu'elle sache voler.
Au retour la nuit dans la voiture, calée entre deux guitares je regarde la lune à moitié qui blanchit la campagne. Valentin choisit la musique. J'aime tout. Je voudrais que ce trajet dure des heures.
Je suis quand même contente d'arriver. Fatiguée. Je n'écris rien à Tigre de peur de le réveiller.
J'ai peur qu'il me déteste déjà. Il m'a dit que je serais mieux avec un jeune. Il m'a dit ça et je l'ai insulté.
Voilà où nous en sommes. A se dire des choses nulles parce qu'on s'aime.


Dimanche soleil au Lac, bruits de fête venus du Temple, odeurs de brochettes cambodgiennes.
Cris d'horreur depuis les manèges de la foire du trône. L'impression de bronzer près du lieu du crime.

Je lis Eugène Green.
Je bois cou tendu la vitamine D venue du ciel.

Je ne pense pas encore à la lourdeur du lundi matin qui viendra, j'ai les pieds nus dans l'herbe, au frais dans un présent éternel.
Je ne pense pas que lundi sera gris et que je ne serai pas assez couverte et que je boirai du thé brûlant.


Le sachet de thé, tellement de travail pour trente secondes dans l'eau chaude.





samedi 13 avril 2013

Lost



- Tu arrives à lire le panneau ?
- Rue de la fidélité.
- Ah, merde...





mardi 9 avril 2013

Les chevaux

Pluie incessante sur Paris et moral gris clair.
Ce sont des pensées spleen de presque anniversaire.

J'écoute le podcast d'une emission avec Tigre. Je suis d'abord enchantée par sa belle voix de précipice. Et puis je me retrouve submergée par son intelligence. Je me dis soudain : je suis si bête, comment peut-il le supporter?

Je passe ensuite le reste de la journée à faire des cauchemars de noyade.

Les jours suivants je ne me sens pas mieux.
Les insectes dans les yeux qui se multiplient, même si ce n'est pas vrai, j'ai l'impression qu'ils envahissent tout, la rétine, le cerveau, les rêves.

Le corps lâche. La main fracturée me fait mal à nouveau, les nuits sont difficiles et le soleil manque cruellement. Je remplace la chaleur par l'eau brûlante de la douche. Je remplace la vitamine D par des kilos de sucre. Je remplace la confiance en moi par un silence de morte.


Je n'ai aucune raison d'être triste, je n'ai aucune envie d'être triste.
Je veux me réjouir de tout.


Oui, ça se décide.

Oui oui oui.



Ce matin je reçois un mail incroyable de mon père, incroyable parce qu'il m'est adressé, déjà, et puis, aussi, il y parle de Tigre. D'une très belle façon.
En pièce jointe, une photo dont il ne dit rien dans son mail. Une photo de ces deux chevaux que j'aime, et qui vivent sur une colline au-dessus du village.

Je ne sais pas comment lui répondre. Nous sommes tellement silencieux l'un et l'autre depuis si longtemps.
Lui parler de ces choses que je ne lui reproche pas, alors que je devrais.
Lui parler de ce que nous avions, et qu'on n'a plus.
Pardonner, est-ce que c'est condamner?

Je vais commencer par lui parler des chevaux.




vendredi 5 avril 2013

Le cœur total

Dans la loge, Audrey boucle mes cheveux avec un fer en me racontant ses dernières péripéties avec Aristide. Un musicien venu de Londres lui demande si elle stresse de monter sur scène. Elle répond "oui un petit peu, enfin c'est surtout...".

Mais elle ne sait pas dire "chagrin d'amour" en anglais.


Pendant le concert, Carole a des problèmes de micro, alors elle passe tout son set à chanter les sourcils froncés. On croirait qu'elle va se jeter sur quelqu'un pour l'étrangler. Elle a quand même cette voix fantastique. Je prends des photos. Je bois une bière gratuite.
Je suis fatiguée de ma soirée de la veille chez Swan, chez qui on a organisé une petite fête parce que Digory était à Paris. Fatiguée mais contente parce que chez Swan c'est un de ces endroits confortables.

Je me colle à l'enceinte pour ressentir la batterie et la basse partout dans mon corps. Comme si j'avais enfin un cœur total. Un cœur à la mesure de mes sentiments. Tout vibre et j'ai l'impression de tomber d'un avion.


Audrey est perturbée par le bruit des gens autour quand elle joue. La moitié de la salle dîne et discute. L'autre moitié est attentive, mais on n'entend jamais les gens qui écoutent. On n'entend que ceux qui s'en fichent.


J'envoie ce texto à Tigre parce que je sais qu'il va rire : "ils ont un cocktail qui s'appelle Pénétrator".


Après le concert, je marche un peu dans le soir en dessous des normales.
Trois SDF squattent une borne autolib.
Une inquiétante vitrine de Noël.












vendredi 29 mars 2013

Deux fois mariés

Cette nuit dans un bar rue vieille du temple, un homme élégant avec un accent de tango et une rose rouge à la boutonnière nous a trouvé si amoureux Tigre et moi qu'il nous a mariés. Il a dit "j'en ai le pouvoir".
C'est la deuxième fois qu'on nous bénit dans un bar la nuit.

Nous sommes mari et femme d'ombre et d'alcool.

En guise d'alliance je porte le seul bijou qu'il m'a offert, un bracelet qui s'effrite, acheté l'automne dernier dans une église.
J'aime ce bracelet qui ne ressemble à rien. Et j'aime qu'on soit deux fois mariés en secret.

Le ciel se fait plus bleu chaque jour mais l'Hiver brûle encore.
Le corps a des envies de nu, des envies de peau, mais se retient.
Quand il aura le go, je ne réponds plus de rien.





lundi 18 mars 2013

Noah, etc...

Cette nuit Emma a donné naissance à un tout nouvel être humain. Un tout petit Noah. Elle m'écrit "ton neveu est né" car elle est comme une soeur.

Le froid norvégien fait place au pré-printemps. On met de petites robes et des bonnets. On marche pieds nus et on s'enrhume. Mais les couchers de soleil sont roses. On a la foi.

Il faut regarder les arbres. Eux, ils savent.

Quand je me plonge dans les yeux couleur-compliquée de l'homme que j'aime, toutes les choses du monde pointu s'arrondissent. Tout se remet à sa place, exactement, dans ses bras immenses. Et si je pleure un peu c'est que j'ai eu peur de perdre l'équilibre.

Il me rend heureuse. Il ne me croit pas toujours. Je me répète.

Tu me rends heureuse.
Heureuse.
Heureuse.

Je peux, si c'est ce que ça coûte, apprendre à vivre sans les larmes.

Je te jure, on s'y fait.

En tout cas, Noah, bienvenue dans tout ça.




mercredi 13 mars 2013

Dans les pas des loups

Paris sous la neige ne bouge plus et se tait.

J'aime les voitures qui roulent toutes ensevelies de poudreuse, elles me font penser à des entartés, humiliés, mais qui continuent d'avancer comme si rien ne s'était passé.

Hier soir sur le pont je me gèle dans la tempête mais il n'y a plus de bus je dois rentrer à pieds. Mes petites tennis ne me protègent de rien et je me souviens d'histoires d'alpinistes aux orteils noirs et qui tombent. Je sautille sur le trottoir. Je recule l'amputation.
Un grand type me dépasse et alors je me cale derrière lui. Heureusement il ne me voit pas, je le colle, je suis son ombre, je marche dans ses pas exactement, à la manière des loups qui, même en meute, ne laissent sur la neige que les traces d'un seul animal.
Il va vite et moi aussi. Nous filons rapides dans la ville jusqu'au moment où il tourne et moi pas.

Je ralentis.

A force de regarder le sol blanc et brillant, je découvre de nouveaux corps flottants. Je leur dis bienvenue. C'est toujours bien d'être moins seule.

J'écris des choses dans la neige. Je prends des photos. Je pense à des choses. Je ne pleure pas.
La magie de la neige fonctionne à chaque fois.
Quand le printemps sera là je m'émerveillerai des abeilles.
Pourvu que jamais je ne m'y habitue.



mercredi 20 février 2013

La fracture

Le mot "fracture" est peut-être l'un de mes mot préférés.
On entend le sens dans le son. On entend la chose qui craque, le corps qui plie, l'arbre qui tombe. La fracture.

La mienne a la forme d'un Y comme un os à vœux.

C'est la première de toute ma vie.
Il aura fallu attendre 31 ans pour que mon squelette me trahisse. (je suis née l'année du suicide de Jean Eustache)

Aux urgences personne n'était pressé, même pas moi, et j'ai rencontré un tailleur de pierre, mordu par son chat. Il était jeune et doux. Je lui ai posé des questions sur son travail. Je l'ai fait parler pour qu'il oublie qu'il avait mal. Et pour oublier que j'étais toute seule.

Contrairement au mot "fracture", le mot "solitude" ne joue pas franc jeu.
On entend la plage et la langueur, dans "solitude".
On entend quelqu'un sourire.
Mais dans "solitude", imbécile, il n'y a personne.




dimanche 17 février 2013

Les âmes le dimanche

- Je sors de la messe. J'ai prié pour nous, les animaux sauvages.
- Tu deviens folle?
- Le manque de toi me rend mystique.


Je me suis blessée chez Maryv et elle a pris soin de moi, et Panda m'a fait des tartines et je me suis réveillée dans cette ville que je ne connais pas du tout alors je suis sortie j'ai marché à peine une minute sous un faux printemps et je suis entrée dans l'église, avec la main qui me faisait mal dans ma poche, c'était l'heure de la messe.

C'était magnifique et intimidant, moi qui ne connais rien des religions je suis touchée par tout ce qu'il y a d'humain dans dieu.
La foule était là, bien rangée, se levait se rasseyait, des centaines de corps croyants ondulants comme une vague apaisante.
On pouvait voir les âmes.

Le prêtre en violet avec sa canne tordue et sa toque dorée, ça m'a fait sourire. La cérémonie, les costumes, ça ressemblait à un anniversaire étrange.
Mais ensuite quand tout s'est terminé au son d'un orgue fou, le prêtre est descendu de son trône pour toucher les gens.
Il souriait gentiment à tout le monde, il n'était pas effrayé par l'armée des chrétiens qui le noyait, il parlait à chacun, un par un, et posait ses grandes mains apaisantes sur leurs corps en demande.

J'ai aimé follement ce prêtre, je me suis demandé quel était le secret de son sourire si pur, imperturbable, contagieux. Je me suis dit "je ne crois en rien mais lui est baigné de quelque chose de plus que nous, c'est évident."
La certitude ? La sagesse ? La foi ? L'amour ?
Je l'ai suivi des yeux longtemps, jusqu'à ce que l'église se vide et qu'il enlève son chapeau doré, jusqu'à ce qu'il redevienne juste un homme.
Je ne suis pas allée lui parler.

J'ai erré sous les vitraux merveilleux un moment, j'ai pensé à Tigre qui aurait su m'expliquer toutes les gravures, j'ai prié pour nous, les animaux sauvages, et puis dans le métro je lui ai envoyé ce texto.




vendredi 15 février 2013

Cyclo

Au réveil, ce message miraculeux de Sophie "Ton livre est une merveille. Chaque détail est un monde. Bravo !!"

Je suis ivre de joie, et ce message efface toutes mes maladresses d'hier soir, il efface les lettres des huissiers, il efface mon mal de tête et mon vendredi matin compliqué, il efface ma tristesse du manque de Tigre. Il remet tout à sa place. Il me rend ma force et me rappelle ce que je suis.

Sophie est celle qui, la première, m'a donné envie d'être écrivain. Je me souviens par coeur de son premier roman que j'ai lu mille et mille fois, et comme je m'étais dit "voilà ce que je veux faire, voilà qui je veux être".
Dans son message, ce que j'entends c'est "ça y est, tu es écrivain, continue comme ça maintenant".

Je danse dans ma tête.
Ce n'est pas moi, c'est la vie qui est cyclothymique.




mardi 12 février 2013

Ni l'un ni l'autre

J'ai regardé deux fois le nouvel épisode de Girls. Hier soir et ce matin. J'ai pleuré les deux fois.
Il m'a bouleversée.
Il m'a donné envie d'écrire une longue lettre à Tigre pour lui expliquer comme je l'aime et comme je ne veux plus aimer quelqu'un d'autre que lui, et comme je ne veux plus qu'il aime quelqu'un d'autre que moi.
Je voulais lui écrire de longues phrases remplies de belles choses et surtout j'avais envie de me blottir contre lui et qu'il me réchauffe avec sa langue.
Au lieu de tout ça, je lui envoie ce mail :

Miss you.

<3




Ma voisine qui était malade ce matin m'a demandé si je pouvais emmener son petit garçon chez la nounou.
Sur le chemin Maxime et moi avons beaucoup discuté. De tramway, de chiens, de voitures. Selon vers quoi pointait son index minuscule.
Ses grands yeux dans les miens.
On a aussi chanté un petit peu.

Et puis je suis allée travailler au Cube à pieds avec Santigold très fort dans les oreilles. Une chanson ni triste ni joyeuse, parce que je ne savais pas du tout comment je me sentais.
Je crois qu'aujourd'hui ça va être une journée ni l'un ni l'autre.





lundi 11 février 2013

Idiote



Sauter à pieds joints dans le sable humide et entendre la mer s'énerver sous un ciel de souris.
Se réveiller au milieu d'amis plus que précieux et préparer le petit déjeuner.
Rire sans cesse. Même le dimanche.



Et le texto à Tigre.

- J'ai tout perdu au casino de Cabourg, je ne suis rien sans toi.
- Idiote je t'aime.





jeudi 7 février 2013

L'envol

Le livre fait un peu parler de lui.
Stéphane est tellement heureux.
Je suis heureuse pour lui.
Pour moi aussi et pour Lodka et Brune et Olivier et Ari et Navel et Jérémie et Line et Ferdinand Griffon.
Je suis heureuse surtout car il a plu aux gens que j'aime. Ceux dont l'avis compte vraiment.

J'avais l'impression depuis le 24 d'être en apnée, je peux enfin souffler un peu.
Je peux me détendre et me dire "je ne m'étais pas complètement trompée, finalement".

Maintenant, le meilleur reste à venir.


mercredi 23 janvier 2013

La fugue de Rocky

En sortant de l'International il y avait une affiche de chat perdu. "Ce grand chat roux est sous traitement, c'est très grave. Il porte un collier vert à paillettes". Rocky, il s'appelait. Et j'ai fondu en larmes.
Toute seule sous mon bonnet j'ai pensé à la mort du Roi, j'ai pensé à celle un jour de Yoyo, j'ai pensé à ce beau concert que je venais de voir toute seule, au roman qui sort demain et sans doute j'étais fatiguée en plus de tout ça, alors j'ai pleuré très fort sur la fugue de Rocky le grand chat roux, et le long de la rue Oberkampf on m'a demandé plusieurs fois ce qui n'allait pas.
Des jeunes très jeunes, comme je l'étais il n'y a pas si longtemps mais on voit bien tout de même que je ne suis plus légère comme eux, ils sont si jolis et plein de forces les enfants de vingt ans. Et personne à part eux ne se souciaient de moi à cet instant.

Tout va bien, j'ai répondu en souriant, puisque c'est la vérité.

J'ai séché mes larmes en regardant les rats de la station République entrer et sortir des poubelles comme des magiciens habiles.

Et puis j'ai tenté de consoler Audrey de toutes les choses de la vie, et j'ai chanté une chanson sous la douche qui faisait rimer paquebot et super beau.

Ensuite tout allait mieux.

Demain, l'aventure des oiseaux démarre.


Être à la hauteur.





samedi 19 janvier 2013

Premiers flocons

Depuis que la fièvre est tombée je crève de froid dans cette chambre.
Mes couettes superposées aux couleurs de fille joyeuse pour seul horizon depuis quatre jours, je m'ennuie, je m'ennuie tellement. Je regarde des films, je fais des rêves improbables, je tousse et vomis et me force à manger et revomis et prends des médicaments et me recouche et rêve à nouveau.
Bronchite infectieuse, a-t-il dit, le docteur sourcils froncés et son troupeau d'antibios.
Infecte aurait suffit.
Elle m'éloigne de tout ce qui me fait du bien, mes amis, mon amour.
Je rêve de retrouver possession de mon corps pour retrouver l'envie du sien.
Être seule et malade ça transforme en enfant, les cauchemars et l'abandon, l'égocentrisme et le manque de tout. Les caprices à personne. Yoyo n'en tient pas compte. Elle est juste très heureuse qu'on reste des jours entiers à ne rien faire.
Elle m'énerve, elle m'émeut, puis je finis toujours par ronronner avec elle.

Et dehors tout s'embellit, la neige tamise la ville de silence sous dix-mille baisers froids.

mercredi 9 janvier 2013

Morceau de printemps

Audrey m'a invitée à aller au théâtre avec elle, je suis contente parce que je n'y vais pas souvent (à part pour voir jouer Audrey).
La salle était très belle, le vin très bon, les retrouvailles joyeuses et douces, et la pièce incompréhensible.
Heureusement une mise en scène géniale, comme un tour de magie.
A la toute fin il y a eu deux papillons qui se sont envolés de la scène, je ne sais pas s'ils faisaient partie de la pièce ou bien s'ils s'étaient tout simplement perdus là dans un morceau de tissu et qu'on les a dérangés.
C'était tellement joli, ces deux fleurs volantes qui sont allées très doucement se poser sur un mur du théâtre, du coup j'ai loupé la fin, toute absorbée par ce petit bout irréel de printemps.

Ensuite, Audrey m'a assurée que cette année serait la notre, qu'on allait réussir de grandes choses.
Elle aussi, avec sa robe à fleurs, était un morceau de printemps.
Alors j'ai eu envie de la croire.


mardi 8 janvier 2013

Patinoire

Je lui écris ce matin "J'ai rêvé qu'on allait à la patinoire".
Voilà le genre de choses qu'on s'envoie. Des petites phrases sans attente de réponse, des déclarations en suspens, dans lesquelles on peut entendre "je pense à toi".
On ne passe pas nos journées à s'envoyer des textos ou des mails, et pourtant je pourrais faire ça, j'aime faire ça, je l'ai déjà fait. Avec Marie par exemple on s'envoyait des petits mots sans arrêt, des bonjour, des bonne nuit, des je t'aime et tu me manques. Je sais faire ça mais je m'adapte.
Je suis un caméléon.
Je m'adapte à Tigre, qui n'est pas trop téléphone, ni longs mails ni rien de ce genre. Tout l'inverse de Marie.
Déjà, c'est un garçon.
Et puis il n'est pas exactement mon petit ami.

Marie depuis a eu un enfant avec une autre fille que moi et je ne peux pas m'empêcher de regarder les photos qu'elle met sur facebook. Il n'y a jamais de photo de l'autre fille, mais je la connais. Je regarde l'enfant et Marie et je me dis que je n'aurais jamais voulu de cette vie avec elle. Je suis vraiment contente qu'elle n'ait pas eu besoin de moi pour être heureuse. Devoir être responsable du bonheur de quelqu'un, bonjour l'angoisse.

Mes patins à glace avaient d'immenses talons, mais j'arrivais à courir vite sur la patinoire. Des gens mettaient des notes et Tigre avait les meilleures. Je lui disais qu'il couchait sans doute avec le jury. Il m'avouait que oui et ça me rassurait. Ensuite, un chat qui n'était pas Yoyo accouchait dans un coffre de voiture de petites poupées de chiffon. Tigre me disait "je ne sais pas ce que ça mange mais on va se débrouiller"



lundi 7 janvier 2013

Sur le toit

Mon roman de janvier tout droit sorti de chez l'imprimeur m'attendait chez Stéphane, en pile gigantesque sur la petite table d'écolier, devant la seule chaise alentour.
Quand il est à Paris Stéphane habite une chambre de bonne en haut d'un immeuble chic près de la Seine. La chambre donne sur un toit qui donne sur la tour eiffel. Je suis tellement amoureuse de la tour eiffel. Rien pour moi n'est cliché dans cette majesté.
On était bien, sur le toit, j'aime Stéphane et sa bienveillance, Stéphane et ses beaux combats.
Je suis contente qu'il soit mon éditeur.
C'est bien de faire partie de cette famille.

J'ai donc dû signer cette pile de livres, mes petits, mes enfants. Mettre un mot gentil à des gens que pour la plupart je ne connais pas en espérant qu'ils le lisent, qu'il leur plaise, qu'ils en parlent. Le tiercé nécessaire à la vie d'un roman aujourd'hui.

Stéphane me dit "je n'ai que deux cd ici". Alors on a écouté celui de Ruddy. La musique de Ruddy c'est une inspiration quasi divine. Je suis heureuse qu'il soit mon ami.

Au restaurant japonais je n'ai pas beaucoup mangé. Je pensais que si, mais Stéphane m'a dit "tu ne manges pas beaucoup" alors j'ai cru entendre Tigre.
Je n'y peux rien si tous les deux font deux mètres et sont des ogres.

Stéphane m'apprend que le jour de mon anniversaire je serai en dédicace à Saumur et ça me rend heureuse.
Les salons du livre en province sont comme de petites fugues, des écarts faits au monde, des promesses de rencontres et de bon vin. La vie la vraie.
Si j'étais célèbre je passerais tous mes week-ends en dédicace. Et mes semaines au bord de la mer. Être Sagan, être Duras, être Sarah Kane, être Sylvia Plath avec modération.


Depuis la baignoire je crie à Yoyo "je me rince et j'arrive". Elle commence à mordre des trucs qu'elle trouve dans mon sac à main. Elle a faim. Elle me regarde lui dire que je me dépêche et que je fais de mon mieux, je me demande si elle pense que je suis un peu folle de parler à mon chat.

Penser à racheter une petite pelle - je ne connais pas le nom exact, une pelle de balayage ? - parce que Yoyo l'a balancée sur le toit.

Penser un jour à discuter entre quatre yeux avec ce chat.



Les textos de Tigre pour me dire que je lui manque.
Nos corps en attente.



dimanche 6 janvier 2013

Les femmes d'avant

Ce week-end j'ai lu un vieux livre de Tigre. Il a tellement de talent que je lui ai envoyé ce texto "je suis contente de t'aimer". Mais très vite, ça n'a plus été seulement ça.
A lire ces choses écrites avant moi, je me suis sentie jalouse faible superflue.

On ne devrait pas aimer un écrivain.
En tant qu'amoureuse, on espère toujours qu'il n'y aura pas eu de femme avant nous. En tout cas on fait comme si. En tout cas on essaie.
Amoureuse d'écrivain on espère surtout qu'il n'y aura pas eu de muse avant nous. Car c'est pire.

Parfois sur la première page du livre : la dédicace à l'Autre. L'horreur. Le ventre en marmelade. Des envies de couteau dedans.

La première fois que j'ai vécu une histoire d'amour, je l'avais inventée. C'était de l'encre sur du papier, c'était une histoire écrite pour Emma - toutes les nuits on s'écrivait des histoires, ça a duré des mois, des années peut-être, la plupart de ces lettres folles sont perdues maintenant - et ce personnage récurrent qui s'appelait Paul, dont j'étais follement amoureuse, c'était déjà Tigre. Je m'en rends compte maintenant.

A 16 ans, j'aimais Tigre mais je pensais qu'il n'existait pas. Il m'a fallu attendre quinze ans pour enfin l'embrasser.

Ce pouvoir qu'on a.
Celui qu'on croit avoir en tout cas.
(c'est la même chose)






samedi 5 janvier 2013

L'âme des choses mortes

Les petits sapins usés, brûlés, jetés sur le trottoir à la fin des célébrations glauques de décembre me mettent les larmes aux yeux. Réellement.

Je suis d'une empathie maladive. Les gens, les pigeons, les plantes, tout ce qui est en souffrance me fait du mal aussi.

Je garde chez moi un coquillage depuis des années juste parce que quelqu'un devant moi sur la plage l'avait jeté pour un autre plus beau. Le coquillage m'avait fait de la peine.

Le jour où Tigre m'a offert un manteau, nous avons jeté l'autre qui tombait en lambeaux, et je n'ai pas pu le mettre dans la poubelle avant de l'avoir longtemps embrassé et remercié pour ce chemin parcouru.

Tigre s'est moqué de moi.
Moi aussi je me suis moquée de moi.

Mais cet amour absolu est un reste de l'enfance, quand je pensais déjà que toutes les choses ont une âme. Mêmes les choses vides. Même les choses mortes. Même les manteaux.



jeudi 3 janvier 2013

Les yeux fermés

Je n’ai jamais pensé à l’année 2013. Plus jeune, je me souviens très bien d’avoir employé "en 2012" comme on dirait "à la st glinglin" en imaginant qu’en 2012 je serai vieille vieille vieille tellement vieille que j’en serais sûrement morte.
Mais du coup, 2013, rien. Sur mon planning de l'existence, 2013 n’existait pas.

C'est au même âge que j'ai commencé à marcher dans la rue les yeux fermés( pour être prête si un jour je devenais aveugle) et à écrire de la main gauche (si un jour ma main droite se trouvait coupée).
Je n'avais sans doute pas une grande confiance en l'avenir.

Je continue parfois de marcher les yeux fermés, petit défi sur les trottoirs, adrénaline du pauvre, mon record est de quinze pas.
Après, le corps panique.

Avant je n'avais pas les corps flottants. Je pense que grâce à eux, annulant la monotonie des paupières closes, je pourrais maintenant dépasser quinze.

On me retrouvera percutée par une voiture avenue Daumesnil et on dira "elle a battu son record, et de beaucoup."

C'est pareil quand je passe trop de temps sans voir Tigre. Les animaux sous les paupières ne suffisent pas à combler ce manque.

Alors, le corps panique.



mercredi 2 janvier 2013

Irrésolue

Toutes les résolutions du monde ne changent pas ceci : les deux premiers jours de l'année se passent toujours dans un coton flou, avec un arrière-goût de cigarette. Même si on ne fume plus (parce que, ça y est : on ne fume plus).
Alcool et danse mêlés, à l’orée du premier jour on a envoyé des baisers par textos, reçu des messages anonymes, on s'est couché moite au lever du soleil après un voyage en taxi (cette année on en prendra moins, c'est juré) et depuis on ne s'est pas trop réveillé.

Dans la brume du monde nouveau mon corps frustré se tend tout entier vers les mains de Tigre, qui n'est pas là.

Je pense à lui plus qu'il ne croit. J'attends ses messages plus que je ne le dis. Cette nouvelle année va tout empirer, j'ai l'impression, au niveau du cœur et de l'attachement.

Ce salopard me manque. Je dis ce salopard parce que je lui en veux de me mettre dans cette situation là, le manque atroce alors que j'avais rien demandé. Il est venu me chercher, cet immense, il est venu me chercher et me droguer de son odeur, de ses gestes, de son sexe, qui lorsqu'il n'est pas là me brûlent de leur absence comme une partie arrachée de moi. Il m'a rendue heureuse et je ne sais pas quoi en faire du tout, on fait quoi, quand on est heureux?


Quand il ne me le dit pas je ne sais pas qu'il m'aime.
Et quand il me le dit, je crois qu'il ment.